Impacts de la loi ELAN sur la copropriété

Datant de 2018, la loi ELAN a introduit plusieurs réformes concernant l’ensemble des domaines de l’immobilier : construction, transaction, location… La copropriété est également concernée avec plusieurs nouvelles mesures adoptées. Quelles sont-elles ? Quelles sont les conséquences pour les copropriétaires et les syndics ? On fait le point sur les modalités de la loi ELAN pour la copropriété au sein de cet article.

Qu’est-ce que la loi ELAN ?

La loi 2018-1021 du 23 novembre 2018 (complétée par l’ordonnance 2019-1101 du 30 octobre 2019) portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi ELAN, est une loi visant à réformer le droit immobilier en y apportant plusieurs modifications ou nouvelles mesures.

La loi englobe plusieurs objectifs, notamment :

  • Réinstaurer l’encadrement des loyers dans les zones tendues ;
  • Instaurer de nouvelles règles locatives (bail mobilité, bail numérique, amélioration de prévention des expulsions, régulation de la location meublée touristique…) ;
  • Réformer le secteur HLM ;
  • Instaurer de nouvelles règles en termes de construction (assouplissement des normes d’accessibilité aux personnes handicapées, construction à tendance écologique…) ;
  • Continuer à lutter contre l’habitat indigne ;
  • Faciliter les transformations de locaux professionnels en locaux d’habitation.

Plusieurs réformes concernent également la copropriété comme nous allons le voir dès à présent.

Les réformes de la loi ELAN pour la copropriété

La plupart des réformes de la loi ELAN concernant la copropriété ont pour objectif de simplifier et améliorer les règles de gestion, notamment pour prévenir et traiter les copropriétés fragiles ou dégradées.

Une autre mesure phare concerne en outre la nécessité de mise à jour du règlement de copropriété (RCP) sur la détermination et l’usage des parties communes.

1 – Les principales réformes visant à simplifier et à améliorer la gestion des copropriétés

Les réformes de la loi Elan en copropriété visant à faciliter et à assouplir les règles en assemblée générale :

  • Les personnes prenant part à l’assemblée générale ont désormais la possibilité de disposer de pouvoirs en nombre illimité à condition que la somme de ceux-ci n’excède pas 10 % de l’ensemble des tantièmes de la résidence (contre 5 % auparavant).
  • Tout copropriétaire peut à présent demander au syndic de convoquer une assemblée générale (pour une demande privative d’autorisation de travaux par exemple), à ses frais.
  • Il est aussi possible dorénavant de tenir l’AG en visioconférence et d’y participer en recourant au vote par correspondance (pratique utilisée massivement durant la période de la crise sanitaire liée au Covid notamment).

Les réformes visant à accroître le pouvoir du conseil syndical :

  • Le/la président(e) du conseil syndical peut désormais assigner le syndic après autorisation de l’AG. Cette dernière peut également délivrer une délégation au CS avec budget concernant les travaux d’entretien de la résidence.
  • Le CS peut demander des documents au syndic (liste des copropriétaires par exemple) sans que celui-ci ne puisse refuser. À défaut, le mandataire s’expose à une pénalité journalière de 15 euros par document non transmis (cette disposition concerne également tout document devant figurer sur l’intranet du syndic).
  • Il est aussi possible pour les parents et enfants de copropriétaires d’intégrer le conseil syndical désormais.

Les autres réformes de règles de gestion :

  • L’extranet du syndic (introduit par la loi ALUR) doit désormais comporter une liste exhaustive de documents répartis en 3 espaces : un premier commun à tous les copropriétaires, un second propre à chaque copropriétaire et enfin un dernier dédié uniquement au conseil syndical.
  • Les délais de prescription concernant les actions juridiques pouvant être initiées par le syndicat des copropriétaires (notamment le recouvrement des charges) sont réduits à 5 ans au lieu de 10 ans auparavant.
  • Les impayés sont également durcis avec une mise en demeure adressée désormais automatiquement au copropriétaire débiteur. À défaut d’un règlement sous 30 jours, ce dernier devra alors régler l’intégralité des trimestres à venir pour l’exercice en cours (à noter que les appels exceptionnels ainsi le fonds loi ALUR sont également concernés par cette disposition).
  • L’individualisation des frais de chauffage est désormais obligatoire, les copropriétés fonctionnant au collectif devant procéder à l’installation de compteurs individuels.

2 – Loi Elan et copropriété : la mise en conformité du règlement de copropriété concernant les parties communes

La loi ELAN pour la copropriété a largement contribué à redéfinir l’usage des parties communes au sein de la copropriété pour y apporter plus de précisions et éviter ainsi de potentiels conflits parmi les copropriétaires, par exemple au sujet de la détermination de l’existence d’un lot ou encore la répartition de charges spéciales.

De cette réforme, découle une nécessité de mise en conformité du règlement de copropriété, notamment sur 3 points précis :

  • Les lots transitoires ;
  • Les droits de jouissance privative sur les parties communes ;
  • Les parties communes spéciales non pourvues de grilles de charges spéciales.

Un état des lieux préalable est avant tout nécessaire afin d’évaluer les besoins de mise en conformité de la résidence, chaque copropriété ayant effectivement une configuration lui étant propre et spécifique. Cet état des lieux prend la forme d’un audit qui nécessite notamment de :

  • Lever une fiche hypothécaire afin de contrôler la numérotation des lots et les éventuelles modifications publiées ;
  • Procéder à une analyse du règlement de copropriété ainsi que de l’EDD (état descriptif de division) et des éventuels modificatifs publiés s’il en existe.

Dans le cas où l’audit révélerait des conformités nécessaires sur un ou plusieurs des 3 points évoqués précédemment, il convient alors de solliciter respectivement un géomètre puis un notaire afin d’effectuer les diligences nécessaires.

La mise en conformité du règlement de copropriété est-elle obligatoire ?

À l’origine rendue obligatoire par la loi ELAN sur la copropriété, la mise en conformité du règlement de copropriété a ensuite été rendue facultative par la loi 3DS du 21 février 2022 avec la possibilité d’être votée à chaque AG jusqu’à sa réalisation.

Il est néanmoins recommandé d’effectuer la mise en conformité dès que possible afin d’éviter d’éventuels litiges pouvant affecter à terme le syndicat des copropriétaires : un contentieux portant sur la répartition de charges spéciales ou la détermination d’existence d’un lot coûtera en effet sans doute beaucoup plus cher en frais de procédures que le coût de la mise en conformité elle-même, sans oublier que le problème demeurera et pourra se représenter par la suite.

Quel est le coût d’une mise en conformité du règlement de copropriété ?

Le coût d’une mise en conformité du règlement de copropriété est fonction de la configuration de la résidence et du volume de travail associé concernant les 3 points prévus par la loi.

Il faut généralement compter plusieurs milliers d’euros dans la mesure où la démarche comporte les frais d’intervention du géomètre et du notaire (incluant les frais de publication légaux).

La mission comporte 2 phases : l’audit préalable du règlement de copropriété puis la concrétisation de la mise en conformité si celle-ci s’avère nécessaire à la suite des résultats de l’audit. Dans tous les cas, un devis doit être demandé pour chacune des 2 phases.

Bien qu’elle soit en principe à l’initiative du syndic, la mise en conformité peut néanmoins être initiée par le conseil syndical tel que le prévoient les dispositions de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 et l’article 27 du décret du 17 mars 1967.

ADB Conseils vous accompagne dans la mise en conformité de votre règlement de copropriété lois ELAN et 3DS en partenariat avec nos équipes de géomètres et de notaires.

Les apports de la loi ELAN en matière de contrat de syndic

Contrairement à une idée parfois reçue, aucune réforme de la loi ELAN pour la copropriété ne porte de près ou de loin sur le contrat de syndic à l’inverse de la loi ALUR qui a notamment introduit le contrat dit « tout sauf ».

Les conséquences de la loi ELAN sur la copropriété

Les réformes de la loi ELAN sur la copropriété ont engendré des avancées (mais également des limites et contraintes) concernant la gestion des immeubles comme nous allons le voir dès à présent.

Les avantages :

  • L’élargissement du nombre de pouvoirs par personne ou la possibilité de voter par correspondance ont contribué à faciliter les règles de participation aux AG, s’inscrivant dans le prolongement des initiatives amorcées par la loi ALUR (assouplissement du vote des travaux notamment).
  • De la même manière, la possibilité pour les parents et enfants d’un/une copropriétaire d’intégrer le conseil syndical à la place de celui/celle-ci constitue une alternative et une solution pour les résidences où l’absentéisme demeure important.
  • L’obligation sous peine d’astreinte de mise à disposition sur l’intranet et auprès du CS des documents relatifs à la copropriété permet plus de transparence de la part du syndic et s’inscrit là aussi dans la continuité des mesures d’encadrement introduites par la loi ALUR.
  • Il est probable que l’individualisation des frais de chauffage entraîne naturellement des économies pour les copropriétaires qui seront plus attentifs à une consommation propre que collective.
  • La délégation avec budget délivrée par l’assemblée générale au CS concernant les travaux d’entretien courants octroie une autonomie à ce dernier pour entretenir efficacement la résidence.
  • La mise en conformité du règlement de copropriété portant sur la détermination et l’usage des parties communes permet donc de prévenir tout conflit qui pourrait survenir en interne au sein de la résidence, par exemple sur la répartition de charges spéciales ou encore la détermination d’existence d’un lot.
  • Concernant le durcissement des impayés, il est probable que la mise en demeure automatique soit d’une certaine efficacité auprès de la plupart des copropriétaires débiteurs.

Les limites et les contraintes :

  • Concernant le vote par correspondance, celui-ci apparaît pratique mais inutile pour les résolutions modifiées en AG (celles-ci ne pouvant prendre en considération les formulaires par correspondance lors du vote). La remise du pouvoir sera donc toujours à privilégier si possible.
  • Bien qu’intéressante sur le papier, la possibilité pour le/la président(e) du CS d’assigner le syndic après autorisation de l’AG se heurte à plusieurs contraintes, à commencer par les frais de procédures qui doivent être avancés par le président et les condamnations qui doivent être réglées en fonds propres par ce dernier dans le cas où la procédure serait perdue. En outre, entrer en conflit ouvert avec le mandataire en poste risque de se répercuter sur la gestion de la résidence. Il est en ce sens plutôt recommandé de changer préalablement de syndic avant d’envisager toute action juridique à l’encontre de l’actuel.
  • La contrainte la plus importante concerne sans doute la réduction des délais de prescription juridique de 10 à 5 ans, les copropriétés ne pouvant plus initier de procédures sur de « longues » périodes antérieures désormais.
  • Bien que leur apport soit des plus intéressant, la mise en conformité du règlement de copropriété ou la pause de compteurs pour l’individualisation du chauffage impliquent un investissement d’ordre financier pour les copropriétaires.
  • Concernant le syndic, certaines dispositions de la loi ELAN sur la copropriété occasionnent une charge de travail supplémentaire (mise en conformité du règlement de copropriété, amélioration de l’intranet, installation de compteurs individuels pour les immeubles à chauffage collectif…) alors que la profession est déjà réputée extrêmement chronophage.

L’essentiel à retenir sur la loi ELAN en copropriété

  • La loi ELAN sur la copropriété est donc à l’origine de plusieurs réformes concernant la copropriété, avec pour principal objectif de simplifier et améliorer les règles de gestion des immeubles.
  • Parmi les mesures proposées, on retrouve notamment certaines liées à la facilitation et à l’assouplissement des règles en AG, une volonté d’accroître le pouvoir des membres du conseil syndical ou encore pour un meilleur encadrement du syndic et des impayés.
  • Une réforme importante concerne en outre la redéfinition de l’usage des parties communes et leur détermination au sein de la copropriété et de la mise en conformité du règlement de copropriété qui s’en accompagne.
  • Comme toutes nouvelles dispositions, celles introduites par la loi ELAN en copropriété comportent des avantages, mais également des limites et contraintes. Il est en ce sens recommandé d’en conserver les réelles améliorations et utilités et de ne pas s’attarder sur les limites ou autres dispositions moins intéressantes.